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Gran Fondo entre mont Lozère et mont Aigoual

«Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que nous n'osons pas,
c'est parce que nous n'osons pas qu'elles sont difficiles.»
Senèque philosophe romain (-4 av JC - 65)

Faire le tour du mont Lozère au départ de St André de Valborgne me turlupinait depuis pas mal de temps déjà. Confinement oblige, ce rêve à priori au-dessus de mes forces se précise dans ma tête courant novembre au point d’en devenir une fixette. Puisqu’en vélo il vaut mieux avoir des remords que des regrets, que l’échec c’est de ne pas tenter, c'est décidé, je me lance dans l’aventure non sans avoir à l'esprit une remarque plus personnelle : En vélo, pour aller loin, il faut ménager le cavalier. Celle-ci commence par la préparation du parcours depuis mon site de cartographie favori, histoire de préciser et quantifier le chantier, quelques maux de tête en perspective avant d’avoir mal aux jambes…
Il s’agit de trouver un itinéraire optimum et cohérant, de définir le sens de rotation de la boucle, d’éviter les raidards sur la fin des hostilités (l'expérience parle), telles sont exigences de la feuille de route. Au final mes recherches aboutissent à une superbe mais difficile boucle, l'orientation des vallées cévenoles étant à peu près parallèles à l'objectif, le parcours est immanquablement constitué de montes-baisses à répétition, de la tôle ondulée grandeur nature, une rafale de torpilleurs de jarrets vous dis-je !

Je passe rapidement sur la préparation physique qui s’est limitée à quelques longues séances spécifiques, en plus des habituelles sorties vallonnées. Au fil des mois ces entrainements solitaires portent leurs fruits et génèrent de la confiance. Enfin l'été arrive, la forme semble être là, il ne reste plus qu’à attendre la bonne fenêtre météo... C’est à l’aube du 01 juillet, par un temps idéal que l’aventure commence, les pneus, le moral et la musette gonflés à bloc :

Je lance ma machine dans le village de Saint André de Valborgne encore endormi dès 6h00. L’échauffement sur le faux plat descendant qui mène jusqu’au pont de Bourgnole est de courte durée malgré un pédalage peu appuyé. Arrivé à ce carrefour je prends la direction du nord vers St Roman de Tousque afin d’atteindre la vallée Française. Cette petite route qui abandonne le fond de vallée, pour atteindre un col est typique à bien des égards des routes secondaires cévenoles (Je rappelle que les routes principales sont ici déjà très tranquilles…). J’adopte un rythme de sénateur pour cette première ascension, tout en profitant des premiers rayons de soleil qui éclairent les cimes lointaines. Il s’agit d’une ascension ni très longue, ni très pentue, dans laquelle le plus dur est de calmer la fougue de l’explorateur matinal que je suis. La bascule au niveau du village est sans répit puisque je descends aussitôt la côte de Fobies qui me mène en bas de la vallée au lieu-dit Le Fez Rolland.

Me voilà en vallée Française qu’il s’agit désormais de quitter, pour rejoindre celle du Galeizon, puis celle de la vallée longue. Pour ce faire, je longe le Gardon de Sainte Croix Vallée Française et me laisse glisser jusqu’au carrefour du Martinet, puis je remonte l’autre bras qu’est le Gardon de St Etienne Vallée Française. Ce long tronçon à peu près plat m’aura permis d’en terminer avec la phase préliminaire après un peu plus d’une heure de selle.

Pour la suite, plusieurs solutions s’offraient à moi, j’ai opté pour la plus radicale et la plus courte : Dès la sortie du village de St Etienne, je tourne à droite sur le petit pont submersible qui saute le Gardon, la route monte directement vers le COL DE PRENTIGARDE en passant par le Mazelet, non loin du sommet dit de « la pierre de la vieille morte ». Cette petite route secrète à souhait, serpente entre pins et chênes verts en desservant quelques écarts éparpillés sur les versants de la vallée. Le mont Mars domine en maître sur le Calbertois et l’ensemble de la vallée. L’approche du sommet est redoutable avec des rampes très sévères que je mets à profit pour tester mon «32 dents» monté pour l’occasion. Les sensations sont bonnes, mais je dois tout de même m’employer.

Le passage en vallée longue est quasi immédiat, car à peine ai-je parcouru un km en descente que je me trouve au hameau du PENDEDIS et son col éponyme, un passage éclair au niveau de la vallée du Galeizon donc.

L’itinéraire persiste dans la direction plein nord puisque je plonge dans la vallée longue au fond de laquelle coule le Gardon d’Alès. Immédiatement après avoir sauté la rivière et franchi la N106, dans les faubourgs du Collet de Dèze, je remonte en direction de la route des crêtes sur une petite route dont l’irrégularité de la pente et la rugosité du revêtement forment un duo implacable dans leur inlassable travail de sape sur mon organisme. Cette vallée préservée de la circulation regorge de petites routes, d’écarts pittoresques, qui contrastent tant avec la route principale du fond de vallée.  La jonction se fait quasiment à hauteur du carrefour vers le COL DE BANETTE que j’atteins en quelques coups de pédales. Je suis à présent au pied de l’objectif, en effet l’imposant massif granitique du mont Lozère dont les rochers de Trenze me fait enfin face, le parcours va contourner par l’est puis le nord ce colosse. Je descends au fond de la vallée du Luech, par une petite route sinueuse qui lézarde une châtaigneraie séculaire, puis je remonte au village de Vialas, ensuite je poursuis dans la même direction jusqu’au COL DE VALOUSSIERE en descente cette fois, pour rejoindre la D906 ; me voilà dans le secteur de la Cezarenque.

Les 19 km qui me séparent de Villefort, ne sont pas les plus durs, malgré un faux plat montant, je m’applique à conserver mon développement durable. Malgré des points de vue intéressants, le trafic routier plutôt dense sur cette artère principale réduit quelque peu l’intérêt de ce secteur. Me voilà dans Villefort après avoir vaincu son COLLET, je m’accorde un arrêt à la fontaine, avant d’entamer la deuxième partie de mon périple….

Dès la sortie du bourg, la direction ouest s’impose et avec elle, la bascule des 100 km au niveau du lac de Villefort, et plus précisément son bras nourri de l’Altier qui descend du Lozère. Le gros morceau de la journée m’attend avec l’enchaînement du COL DES TRIBES puis du COL DE FINIELS qui ne sont séparés que par une très courte descente de deux kilomètres, pour une ascension dont la pente ne cessera de croître tout au long de ses 35 km. Quelques points remarquables agrémentent le parcours, dont les châteaux de Castanet puis de Champ, les traversées de hameaux, et cette imposante face nord du mont Lozère qui m’accompagne jusqu’au sommet. Je n’échappe pas au « coup de moins bien » que je redoutais tant dans cette usante ascension, le vent de face s’est invité à la fête, puis une douleur persistante aux fessiers m’accompagne sans relâche. J’ai beau jouer du dérailleur, monter en danseuse dans le 2% de ce faux plat, piocher dans la musette, vider mes bidons, rien n’y fait. Oubliant les paysages qui s’offrent à mes yeux, mon esprit se met à nouveau, à vagabonder ; ressassant ces citations qui m'ont piégé comme un cadet. Je n’ai pas encore de remords, mais il m'apparait évident que ce Sénèque n'a jamais fait de vélo dans sa jeunesse !

Curieusement c’est lorsque la route se redresse, à l’approche du COL DES TRIBES que mes soucis s’estompent.
C’est devenu un rituel, lors de la traversée du Bleymard, je compare le Lot à la Combesourde, pour une nouvelle fois confirmer une observation vieille d’une quinzaine d’années. Après l’incontournable casse-croûte, je me lance dans la montée vers le COL DE FINIELS, le point d’orgue du périple. Dès la sortie du Mazel, cinq kilomètres pentus se présentent, nul besoin de «mon 32 dents» je trouve un rythme convenable malgré les lacets qui s’enchaînent dans une pente à 8%. Le passage devant la station de ski est un soulagement, en effet je sais qu’il ne reste qu’une bonne rampe à 10%, avant que la pente devienne insignifiante, j’avale les derniers kilomètres du COL DE FINIELS sans difficultés, le plus dur est derrière me dis-je en passant le sommet.

Je prends désormais la direction du sud, avec comme repère LE MONT AIGOUAL sur la ligne d‘horizon. 35 km de descente puis de plat m’attendent. Je ne me lasse jamais de ces chaos de granite qui jalonnent le début de la descente, de cette vue imprenable sur l’ensemble du massif dont je reconnais certaines silhouettes caractéristiques. L’arrivée au Pont de Montvert et ses typiques maisons est l’occasion d’une nouvelle pause avant de poursuivre jusqu’à Florac. Désormais, la route suit le Tarn qui a creusé son lit dans le granite, formant une vallée plus ouverte que les célèbres gorges taillées dans le calcaire, situées plus en aval. Je prends soin de poursuivre le pédalage dans cette longue descente, histoire de ne pas refroidir le moteur. A la sortie de Bédouès la route se relève, l'occasion de remettre en service ma paire de bielles et de faire le point sur le niveau de carburant...Le constat est surprenant, la jauge n’a pas trop baissé !

Après la traversée de la sous-préfecture lozérienne, je remonte la vallée du Tarnon, finalement seul un court passage avant le Mazel s’avère délicat, le restant du parcours étant plat. A hauteur des Vanels, le parcours prend théoriquement la direction de l’est, ultime changement d’orientation jusqu’à l’arrivée. L’ascension du COL DU MARQUAIRES depuis les Vanels étant la dernière difficulté du programme.

J’en décide autrement, c’est vers l’Aigoual que j’irai, grimpant ainsi dans la même journée les deux monts emblématiques des Cévennes ! L’ascension débute par le COL DU PERJURET, d’abord en faux plat jusqu’au typique village de Fraissinet de Fourques, puis en lacets jusqu’à l’arrivée au col. Ensuite 7 km irréguliers m’attendent jusqu’à Cabrillac. Mes forces déclinent inévitablement, mais la pente indulgente m’aide dans ma tâche. Enfin le dernier tronçon de montée est là, 6-7 % de moyenne, ce n’est pas énorme mais j’ai 200 km dans les pattes, quelques crampes surgissent comme des coups de couteaux dans les cuisses. Enfin la dernière rampe significative se présente et le 32 dents fait son retour, j’arrive en haut du graal soulagé et heureux.

J’entame la fin du parcours par quasiment 28 km de descente. Au bout de la vallée de Seixt, je me dois d’escalader LE COL SALIDES, la dernière difficulté : 1,5 km à 8% de moyenne, j’adopte un rythme régulier tout en souplesse évitant le retour tant redouté des crampes…

Me voilà enfin en vallée Borgne, je n’ai plus un coup de pédale à donner sur les 10 km qui me séparent de l’arrivée. Une descente tranquille au cours de laquelle défile dans ma tête toute la palette d’émotions vécues au cours de cette journée inoubliable longue de 233 km et 5000 m de dénivelée !

Toutes les caractéristiques du parcours sont sur strava.